Recours entre constructeurs et prescription

7 juillet 2022

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David GUINET

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  • Droit immobilier

Nous savons que, en matière de désordres de construction de nature décennale, le maître d’ouvrage dispose d’un délai de dix ans à compter de la réception pour rechercher la responsabilité civile décennale des constructeurs.

Les actions des constructeurs entre eux pour la contribution à la dette sont soumises au délai de prescription quinquennal de l’art. 2224 du Code Civil (position énoncée par la Cour de Cassation par deux arrêts du 16 janvier 2020 n°18-25.915 et n°18-21.895, rappelée plusieurs fois depuis, et également admise par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 12 avril 2022, n°448946).

Epineuse demeure néanmoins la question du point de départ de ce délai de 5 ans, notamment dans l’hypothèse très fréquente d’une expertise judiciaire : la connaissance du fait à l’origine de l’action est-elle l’assignation en référé-expertise ? une note de l’expert ? son rapport ? l’assignation au fond du maître d’ouvrage ?

Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat, après avoir rappelé les termes de l’art. 2224 du Code Civil (« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer »), indique que le délai de prescription court « … à compter de la manifestation du dommage, c’est-à-dire de la date à laquelle la victime a une connaissance suffisamment certaine de l’étendue du dommage, quand bien même le responsable de celui-ci ne serait à cette date pas encore déterminé ».

Ainsi, alors que la Cour administrative d’appel avait fixé le point de départ du délai au rapport d’expertise, le Conseil d’Etat juge que « En retenant ainsi comme point de départ de la prescription non la manifestation du dommage, mais l’identification de l’origine des désordres affectant l’installation de chauffage et de climatisation de l’ouvrage et celle des responsables de ces désordres, la cour a commis une erreur de droit ».

 

Cette analyse doit conduire à la plus grande prudence en interrompant très rapidement le délai de prescription.

 

CE, 10 juin 2022, n°450675