Mise à disposition de bureaux associée à la fourniture de services (coworking) : quid de la qualification de bail ? 

coworking statut bail commercial

2 octobre 2024

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David GUINET

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  • Droit immobilier

Il a déjà été jugé à plusieurs reprises par le passé que le statut des baux commerciaux ne s’applique pas à une convention portant sur la mise à disposition de locaux accessoires à la fourniture de services, les deux étant constitutives d’un ensemble. 

Il ressort de la jurisprudence que plus les services proposés sont nombreux et exclusifs de l’autonomie du « locataire », plus la qualification de bail commercial semble devoir être écartée.

La Cour de cassation vient de se prononcer une nouvelle fois sur cette question. Le bailleur avait loué à bail commercial des locaux à un preneur qui lui-même concluait avec des tiers des « Contrats de prestations de services et mises à disposition de bureaux » (il s’agissait d’espaces de coworking). Le bailleur a considéré qu’il s’agissait de sous-locations et a assigné le locataire en réajustement du loyer principal, sur le fondement de l’art. L 145-31 du Code de commerce qui prévoit notamment que lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au prix de la location principale, le bailleur a la faculté d’exiger une augmentation correspondante du loyer de la location principale. 

Le locataire a soutenu devant la Cour de cassation qu’il ne s’agissait pas d’une sous-location commerciale mais d’une convention de mise à disposition d’espaces assortie de nombreuses prestations de services comprises dans le prix, telles que l’ameublement et l’entretien des locaux, le chauffage, l’accès internet, le téléphone, l’assurance, l’accès à des espaces partagés (réfectoire, kitchenette, salle de réunion, salle de détente, machine à café en libre-service gratuit, sanitaires), service d’accueil, surveillance et sécurisation des bâtiments, prestations qui n’étaient pas considérées comme accessoires mais comme parties intégrantes de la mise à disposition des espaces de travail.

La Cour de cassation donne raison au locataire au motif que « la redevance fixée globalement rémunérait indissociablement tant la mise à disposition de bureaux équipés que les prestations de service spécifiques recherchées par les clients ». Il ne pouvait donc s’agir de contrats de sous-location et l’action en réajustement du loyer se trouvait alors infondée.

Attention toutefois à ne pas conclure des contrats de prestations de services « fictifs » pour tenter d’échapper à la réglementation du statut des baux commerciaux. Si la mise à disposition des locaux et la fourniture de services peuvent être indissociables, encore faut-il que les services soient bien réels et suffisants, à défaut de quoi ils ne seraient que l’accessoire courant d’une location.

Cass. Civ. 3ème, 27 juin 2024, n°22-22.823

David GUINET