Manquement par le locataire commercial à son obligation de remise en état des locaux loués : le bailleur doit néanmoins prouver son préjudice !

Dans trois affaires soumises à la Cour de cassation, les bailleurs commerciaux demandaient à leurs locataires de les indemniser au titre du coût de travaux de remise en état des locaux (les locataires n’ayant manifestement pas respecté leurs obligations d’entretien et de réparation des locaux loués résultant soit des termes du bail soit des termes de la Loi).

La Cour de cassation énonce que le locataire qui restitue les locaux dans un état non-conforme à ses obligations découlant de la Loi ou du contrat, commet un manquement contractuel et doit réparer le préjudice éventuellement subi de ce chef par le bailleur.

Elle précise, conformément à sa jurisprudence antérieure, que ce préjudice peut comprendre le coût de la remise en état des locaux, sans que son indemnisation ne soit subordonnée à l’exécution des réparations ou à l’engagement effectif des dépenses.

Toutefois, et c’est là sans doute le point important, le juge, tenu d’évaluer le préjudice à la date à laquelle il statue, doit prendre en compte, lorsqu’elles sont invoquées, les circonstances postérieures à la libération des locaux, telles que la relocation, la vente ou la démolition.

Le bailleur doit donc rapporter la preuve du préjudice subi résultant du non-respect par le locataire de son obligation de restituer les locaux en bon état de réparation.

Dans les affaires concernées, il a été considéré que le bailleur ne justifiait pas de ce préjudice dès lors, soit qu’il avait reloué le local sans justifier avoir effectivement engagé des dépenses, soit qu’il avait vendu le local sans justifier d’une dépréciation du prix de revente en lien avec les manquements du preneur.

À suivre la Cour de cassation, il faudrait que le bailleur conserve son local vide et s’abstienne de toute vente pendant toute la durée de la procédure judiciaire tendant à la fixation de son préjudice afin qu’aucune circonstance postérieure à la restitution des locaux ne viennent impacter défavorablement le calcul …

Illusoire. Le temps de la justice n’est pas le temps des affaires …

Cass. Civ. 3ème, 27 juin 2024, n°22-24.502, n°22-21.272 et n°22-10.298