Bail commercial : précisions sur le domaine d’application du lissage des conséquences du déplafonnement du loyer du bail renouvelé
31 octobre 2025
| |- Droit immobilier
1. Qu’est-ce que le déplafonnement du loyer du bail commercial renouvelé ?
En matière de bail commercial, s’agissant de la fixation du loyer du bail renouvelé, le principe est qu’il doit correspondre à la « valeur locative », laquelle, à défaut d’accord (pouvant résulter d’une clause du bail initial fixant par anticipation le loyer de renouvellement), est déterminée en fonction des éléments suivants : les caractéristiques du local, la destination des lieux, les obligations respectives des parties (les clauses du bail), les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage (art. L145-33 du Code de commerce).
Toutefois, il est également prévu qu’à moins d’une modification notable des quatre premiers éléments (exclusion des prix couramment pratiqués dans le voisinage), le loyer reste « plafonné » à la variation des indices ILC ou ILAT (selon le type d’activité) publiés par l’INSEE (art. L145-34 du Code de commerce) (sauf exception liée à la durée du bail).
En présence d’une modification notable de l’un de ces quatre éléments, le déplafonnement du loyer peut être invoqué pour sa fixation à la valeur locative.
Toutefois, le déplafonnement est automatiquement acquis :
- Si le bail a une durée contractuelle supérieure à 9 ans,
- Lorsque, par l’effet de la tacite prolongation, la durée du bail (initialement conclu pour une durée contractuelle de neuf ans) excède 12 ans (la tacite prolongation s’entend du bail qui se poursuit au-delà de son terme contractuel, faute de congé donné par le bailleur ou de demande de renouvellement émanant du preneur).
2. Qu’est-ce que le lissage des conséquences du déplafonnement du loyer ?
Depuis la Loi dite « PINEL » n°2014-626 du 18 juin 2014, l’article L145-34 du Code de commerce susvisé prévoit dans son dernier alinéa qu’en cas de déplafonnement du loyer du bail renouvelé :
- Soit par modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33 composant la valeur locative,
- Soit s’il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d’une clause du contrat relative à la durée du bail (durée contractuelle supérieure à neuf ans), la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Par ce mécanisme, il s’agit d’étaler dans le temps (ou de « lisser ») l’augmentation de loyer pouvant résulter du déplafonnement.
3. Ce mécanisme d’étalement s’applique-t-il aux baux dont la durée excède 12 ans par l’effet de la tacite prolongation ?
La Cour de cassation répond par la négative dans son arrêt du 16 octobre 2025.
L’étalement des conséquences du déplafonnement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 145-34 du Code de commerce, ne s’applique que dans le cas d’une modification notable des quatre premiers éléments composant la valeur locative ou lorsque la durée du bail est contractuellement supérieure à neuf ans, et non aux baux de neuf ans qui se sont poursuivis, par l’effet de la tacite prolongation, pendant plus de douze ans.
Cass. Civ. 3ème, 16 octobre 2025, n°23-23.834