Avoirs détenus à l’étranger : dernières actualités jurisprudentielles

Comptes étrangers droit fiscal

5 décembre 2024

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Laëtitia TAQUET

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  • Droit fiscal

Deux arrêts récents méritent d’être relevés en ce qui concerne les avoirs détenus à l’étranger : 

1. Tous les comptes utilisés à l’étranger, même sans procuration, doivent être déclarés 

Pour rappel, les personnes physiques, domiciliées ou établies en France, doivent déclarer chaque année en même temps que leurs déclarations de revenus, les références des comptes financiers ouverts, détenus, utilisés ou clos par elles à l’étranger, sur le formulaire n° 3916-3916 bis (article 1649 A du CGI).

Par ailleurs, lorsque cette obligation déclarative n’a pas été respectée, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due (article L 169 du LPF). 

Le Conseil d’État vient de préciser que cette obligation déclarative vise également les comptes utilisés à l’étranger par le contribuable même si il n’en n’est pas le titulaire ou ne dispose pas de procuration.

Au cas particulier, Madame A. avait hérité des stock-options de son époux, pour lesquels elle avait procédé à la levée des options puis à la cession des titres correspondants. Le produit de la cession avait été versé sur un compte ouvert à l’étranger au nom de son époux et dont elle ignorait l’existence jusque-là. Elle a donc été considérée comme ayant utilisé ce compte même si elle n’en était pas titulaire ni ne détenait de procuration, et à ce titre elle aurait dû souscrire la déclaration précitée. Ne l’ayant pas souscrite, le délai de reprise de 10 ans s’appliquait donc aux gains des cession. 

CE 14-10-2024 n° 489580

2. Intérêts produits par des avoirs étrangers non déclarés : pas de taxation d’office aux droits de mutation à titre gratuit 

    Lorsque l’obligation déclarative précitée (concerne également les contrats de capitalisation détenus à l’étranger), n’a pas été respectée au moins une fois au titre des dix années précédentes, l’administration peut demander au contribuable soumis à cette obligation de fournir dans un délai de soixante jours toutes informations ou justifications sur l’origine et les modalités d’acquisition des avoirs figurant sur le compte ou le contrat de capitalisation ou le placement de même nature (article L  23 C du LPF).

    En l’absence de réponse, l’administration peut taxer d’office les revenus considérés aux droits de mutation à titre gratuit au taux de 60 %. En cas de réponse insuffisante, la taxation d’office ne peut intervenir que si, après mise en demeure de compléter cette réponse dans un délai de 30 jours, il n’est pas satisfait à cette demande (articles L 23 C, L 71 et 755 du LPF).

    Les droits sont alors calculés sur la valeur la plus élevée connue de l’administration des avoirs figurant sur le compte ou le contrat au cours des dix années précédant l’envoi de la demande d’informations ou de justifications, diminuée de la valeur des avoirs dont l’origine et les modalités d’acquisition ont été justifiées (article 755 du LPF).

    La Cour de cassation vient de préciser que dès lors que le contribuable avait établi qu’une partie des avoirs litigieux était constituée des intérêts produits par ces avoirs, il justifie ainsi de l’origine et des modalités d’acquisition de ces intérêts, à ce titre, ils ne constituent pas un patrimoine acquis à titre gratuit, et ne sont donc pas soumis à la taxation d’office.

    Cass. com. 6-11-2024 n° 636 F-B

    Laëtitia Taquet